Malgré la peur des terroristes des Forces Démocratiques Alliées (ADF) qui y sèment la terreur depuis de longues années, la population de Mutwanga et des localités environnantes espèrent à une éventuelle relance économique dans la région grâce aux différents projets de développement encadrés par le Gouvernement congolais, à travers l’Institut Congolais de la Conservation de la Nature (ICCN), et la Fondation Virunga.
Pas de recette magique. Il s’agit en effet de la mise en oeuvre d’une politique de développement basée sur la création de l’économie verte.
Tout commence en 2012 quand la Fondation Virunga par l’entremise de sa structure Virunga Energies a construit la première Centrale hydroélectrique de Mutwanga.
Avec une capacité de production de 1,3 Mégawatts, la Centrale hydroélectrique de Mutwanga a offert un argument de taille aux autorités du Parc national des Virunga pour convaincre les investisseurs et les industriels à profiter de la disponibilité de l’énergie.
« C’est une première du réseau des Centrales hydroélectriques. Il y en a maintenant trois qui sont en fonctionnement. Une quatrième est en construction. C’est devenu, petit à petit, la plus grande source d’énergie renouvelable pour le public à l’Est de la RDC. C’est devenu un énorme programme maintenant. », a expliqué M. Emmanuel de Merode, Directeur provincial de l’ICCN/Nord-Kivu.
Selon M. Emmanuel de Merode, cette petite Centrale alimente non seulement la cité de Mutwanga et une partie de la cité de Nzenga mais surtout les autres sites comme le Parc économique de Mutwanga. Une zone industrielle qui témoigne de l’effort de l’ICCN et de la Fondation Virunga de développer une industrie de pointe de transformation « au cœur de la zone dite des ADF ».
« De cette façon là, on arrive à montrer que l’économie de la société peut se reconstruire même au coeur de cette zone qui est très difficile », a-t-il avancé.
L’énergie étant un intrant absolument nécessaire pour l’industrie, beaucoup d’investisseurs avaient exprimé leur intention d’installer leurs activités à Mutwanga. Cependant, la plupart d’entre eux ont dû faire marche-arrière à cause de la persistance de l’insécurité occasionnée par l’activisme des terroristes des Forces Démocratiques Alliées (ADF).
Selon Jonathan Kahumba, l’ingénieur chargé de la production et de l’exploitation de la Centrale hydroélectrique de Mutwanga, la consommation locale de l’énergie atteint entre 15 et 17% de la puissance cumulée des deux machines installées.
« Une machine qui fournit 450 KVA demande 2 442 litres d’eau pour son fonctionnement. Pour la seconde machine qui a été montée en 2019, elle ne demande que 800 litres d’eau pour fonctionner et produit 1500 KVA. Pour l’instant, nous atteignons 17% de la puissance de la Centrale. », a-t-il indiqué.
Il reste donc une marge suffisante (80 à 85%) pour alimenter les autres abonnés dans les jours à venir.
Pour l’ingénieur Jonathan Kahumba, « s’il n’y avait pas d’insécurité, on aurait atteint 60% de la puissance de la Centrale hydroélectrique de Mutwanga. »
Une savonnerie moderne et une chocolaterie en avant-poste
Grâce à l’énergie produite par la Centrale hydroélectrique de Mutwanga, une Zone industrielle fait la différence dans la partie Est de la République Démocratique du Congo (RDC).
Il y a tout d’abord une une usine ultra moderne SICOVIR (Société industrielle et commerciale de Virunga) créée depuis septembre 2013.
Spécialisée dans la production et la commercialisation d’une gamme variée de savons à destination de ses nombreux clients, SICOVIR est équipée des machines ayant une grande capacité de production entre 300 et 400 tonnes de savons par mois.
RDC Mutwanga la cité longtemps hantée par les ADF vit une expérience unique de création de léconomie verte 1
D’après M. Bastien Alard, responsable du volet Agriculture au sein de la Fondation Virunga, l’usine emploie plus de 150 personnes.
« On est parti du constat selon lequel tous les savons étaient importés. Il n’y avait pas encore d’usine de production de savon à l’Est de la RDC. D’où l’idée de pouvoir valoriser l’huile de palme produite localement et la transformer en savon pour la population congolaise. », a-t-il mentionné.
En tant qu’entreprise industrielle et commerciale, SICOVIR s’est imposée comme la plus importante usine de production de savons dans la partie Est de la République Démocratique du Congo (RDC). La distribution de sa gamme composée de savons de lessive, de toilette et liquides s’étend jusqu’à Kisangani, chef-lieu de la Province Orientale.
« L’usine peut encore produire deux fois plus mais il y a des problèmes de routes et d’approvisionnement. On essaie progressivement d’améliorer. L’huile est achetée depuis le Nord de la province. Comme il y a de l’insécurité, il est difficile de ramener toute la production de la brousse. », s’est-il préoccupé.
Un autre success story, c’est bien entendu la société Virunga Chocolat, une société de transformation locale de cacao.RDC Mutwanga la cité longtemps hantée par les ADF vit une expérience unique de création de léconomie verte 2
« Virunga Chocolat transforme la production des paysans pour en faire des produits finis », explique M. Roger Marora, Responsable de production au sein de Virunga Chocolat.
A en croire M. Roger Marora, l’ICCN et ses partenaires mettent ainsi en oeuvre l’approche de la conservation communautaire. Objectif : favoriser la création de l’économie verte.
« Sur les 100% des bénéfices réalisés, 50% sont reversés dans des projets communautaires notamment le soutien aux écoles y compris l’éducation environnementale et l’appui à toutes les activités agricoles des paysans; et les autres 50% sont affectés à la conservation du Parc national des Virunga », a-t-il renseigné.
A travers le Parc économique ou la Zone industrielle de Mutwanga, l’Etat congolais et la Fondation Virunga encadrent des entrepreneurs du secteur privé, leur offre un espace où ils peuvent entreprendre, faire des usines dans une zone où il y a l’électricité et de l’eau.