A l’heure de la transition énergétique, adopter des modes de production non polluants est un défi majeur pour une Afrique qui affiche de grandes ambitions d’industrialisation et de développement. Le continent doit dès lors s’engager dans la décarbonisation de son économie, a expliqué Evody Tshijik, docteur en génie métallurgique et matériaux, originaire de la RD Congo, dans un entretien accordé à Radio Vatican-
Si l’Afrique est le continent le moins pollueur, il n’est pas pour autant épargné par les effets du changement climatique. Par ailleurs, ses grandes ambitions en matière d’industrialisation et de développement l’obligent à adopter des modes de production non polluants, notamment en réduisant la quantité d’émission de gaz à effet de serre et en abandonnant progressivement les énergies fossiles, déclare Evody Tshijik, docteur en génie métallurgique et matériaux de la Colorado School of mines.
Comprendre la décarbonisation
La décarbonisation (ou décarbonation) est l’ensemble des mesures qui visent à réduire considérablement, voire à éliminer, la production du dioxyde de carbone (CO2), principal gaz à effet de serre (GES), dans les activités humaines. Ces mesures sont notamment en œuvre dans les industries minières ou de cimenterie, et dans des procédés qui utilisent des énergies émettrices de GES, comme les hydrocarbures, explique Evody Tshijik. Par la décarbonisation, on réduit ainsi l’empreinte carbone d’une industrie, en développant des procédés qui produisent moins de gaz à effet de serre, ou en migrant vers des énergies propres (solaire, éolienne, hydroélectrique).
Les défis pour une industrie décarbonée en Afrique
Cependant, reconnaît l’ingénieure métallurgique, mettre en œuvre la décarbonisation dans les industries du continent n’est pas chose aisée. En République démocratique du Congo, son pays d’origine, comme dans bien de pays africains, «l’’un des plus grands défis du moment, ce sont les infrastructures qui peuvent nous aider progressivement à faire une transition des hydrocarbures vers les énergies renouvelables», affirme-t-elle. Beaucoup d’industries ont des infrastructures vétustes qui ne permettent guère d’enclencher la décarbonisation des économies africaines.
Par-delà l’Afrique, souligne Evody Tshijik, un autre défi majeur pour la décarbonisation dans le monde est le rendement de ces énergies renouvelables par rapport à la demande d’énergie que requièrent les nouveaux procédés dans une industrie décarbonée. Pour l’Afrique, soutient-elle, l’hydroélectricité est l’énergie la plus intéressante, au vu du nombre de cours d’eau que compte le continent.
Une Afrique ambitieuse
Pour l’ingénieure congolaise, les pays africains ne doivent pas négliger la décarbonisation au motif que l’Afrique est le continent qui pollue le moins. S’ils ne polluent pas autant que les pays développés, explique-t-elle, c’est probablement parce qu’ils n’ont pas la même capacité de production qu’eux. «Mais nous voyons une Afrique qui est en réveil en ce moment, (…) une Afrique qui a beaucoup d’ambition» en matière d’industrialisation et de développement économique.
«Pour arriver à réaliser toutes ces ambitions que nous avons, nous aurons besoin d’augmenter nos productions de matières premières et d’autre commodités qui sont nécessaires pour le développement de l’Afrique. Cela se traduit par une augmentation des procédés d’industrie», confie Evody Tshijik. Ainsi, l’Afrique devrait apprendre de l’histoire des pays industrialisés pour ne pas s’inscrire dans la même trajectoire qui a conduit à la crise écologique à laquelle le monde fait face aujourd’hui. «Nous pouvons déjà commencer à nous engager dans cette conversation là et vraiment arriver à faire une Afrique, comme on dit, green».